. Reliant deux rives d’un fleuve ou d’une rivière, enjambant une vallée et des gorges, les ponts font partie de notre quotidien. Il y en a plus de 200 000 en France ! Certains sont plus symboliques que d’autres et racontent une histoire particulière.
Le pont de Rohan à Landerneau
. C’est l'un des tout derniers ponts habités d'Europe. Au Moyen-Age, les ponts habités étaient monnaie courante. L'habitat était très concentré, on utilisait tous les m2, pour les habitants mais aussi pour les commerçants car les ponts sont par définition des lieux de passage. A partir du XVIIIe, en raison des risques d'incendie, de l'insalubrité ou l'embellissement des villes, ces ponts ont peu à peu disparu du paysage urbain. Sauf à de rares exceptions, comme le Ponte Vecchio à Florence, ou le Krämerbrücke à Erfurt, en Allemagne.
A Landerneau (Finistère), le pont de Rohan, bâti en 1510, long de 67 mètres avec ses 5 arches, est l'un des tout derniers ponts habités d'Europe. Il a résisté à quatre incendies et aux vicissitudes de l'Histoire.
La famille des Rohan comprit très vite l’intérêt de taxer le passage et d’y installer des commerces et marchands. Pharmacien, libraire, cafetier, crêpier ont au fil du temps remplacé meunier, bourrelier, marchand de drap et orfèvre. Le moulin a été remplacé par un immeuble de rapport à la fin du XIXe. On raconte qu’au XVIe siècle, une prison fut installée rive droite, considérée comme la " plus grande passoire de l’Europe de l’Ouest ". Il était aisé pour les prisonniers de s’évader en sautant dans l’Elorn car le bruit de la rivière couvrait leur fuite ! La prison n'existe plus.
Désormais, il y a une quinzaine d'habitants. On y vit un peu comme dans une bulle, quasiment en autonomie, avec des commerces autour : il y a une vraie vie du pont, un commerçant propriétaire était surnommé le maire du pont !
Le pont du Gard
. Il impressionne encore tous ceux qui se trouvent à ses pieds. Le pont du Gard a été bâti par les Romains pour alimenter Nîmes (Gard) en eau. L’eau était captée à 50 kilomètres de là, au pied d’Uzès. Il constitue donc une partie de l’aqueduc de Nîmes. Construit en calcaire molassique, une pierre locale, le plus haut pont connu du monde romain (48 mètres) se distingue par ses trois ponts superposés, avec 6, 11 et 35 arcades. Mal entretenu, il a été abandonné au début du VIe siècle. Au Moyen-Âge, son niveau médian sert de passage pour aller à la foire de Beaucaire, au XVIIIe, on accole un pont routier à la façade, sur lequel on roulait en voiture au siècle dernier. Depuis, le pont du Gard a été sanctuarisé, devenant patrimoine mondial de l’humanité en 1985.
Le pont d’Avignon
. Tout le monde connaît la chanson rendue célèbre par une opérette créée pour l’Opéra-Comique de Paris … Le pont (Saint-Bénézet de son vrai nom), a été construit au XIIe siècle, selon la légende par ce berger d’Ardèche qui aurait entendu des voix. Avec 22 arches, sur 920 mètres, en épousant les sinuosités du fleuve, il permettait de franchir le Rhône, mais n’était pas assez large pour que deux charrettes se croisent… Il permettait en réalité de contrôler le trafic fluvial. Mais le pont d’Avignon (Vaucluse) ne mène plus nulle part. Il est coupé en deux. Il a en effet subi de nombreuses vicissitudes, et surtout des destructions à cause des crues du Rhône et des modifications hydrologiques du fleuve. On le reconstruisit plusieurs fois mais, en 1669, on l’abandonna pour le laisser dans l’état quasi-actuel, avec quatre arches.
Le pont Neuf
. Comme son nom ne l’indique pas, c’est le pont le plus ancien de Paris ! Le pont Neuf, l’un des 37 ponts de la Seine parisienne, date de la fin du XVIe-début du XVIIe. Sa principale nouveauté ? Alors qu’à l’époque, les ponts comportent souvent des habitations, lui en est dépourvu. Ce pont en pierre dispose aussi de trottoirs permettant aux piétons de se protéger des chevaux et de la boue. C’est certainement aujourd’hui le pont le plus connu de la capitale.
Le pont-canal de Briare
. Un pont peut aussi servir à faire passer des bateaux… C’est le cas du pont-canal de Briare (Loiret), construit par l’entreprise Eiffel à la fin du XIXe siècle. Il fallait permettre aux péniches de relier le canal latéral à la Loire au canal de Briare, en enjambant la capricieuse Loire. Avec 662 mètres de long, suspendu à 11 mètres au-dessus du fleuve, l’ouvrage qui pèse 13.680 tonnes fut longtemps l’un des plus grands ponts du genre dans le monde. Il a récemment concouru pour le monument préféré des Français, terminant à la 4e place.
Le pont transbordeur
. Ils n’étaient qu’une poignée en France, il est le dernier. Il n’y en a plus que huit dans le monde. Le pont-transbordeur qui relie Échillais à Rochefort est une réalisation astucieuse de Ferdinand Arnodin qui, à la fin du XIXe, permet de laisser passer les immenses bateaux qui sortent de l’arsenal de marine de Rochefort (Charente-Maritime). Comment ? Le tablier reste fixe, mais il est situé à 50 mètres au-dessus de l’eau. Il tracte, via un chariot sur des rails, une nacelle, située, elle, en contrebas, qui transporte charrettes, piétons, puis voitures au XXe siècle. Désormais, seuls les piétons et vélos peuvent embarquer pour cette traversée un peu surannée, quelques mètres au-dessus de l’eau.
Le pont Valentré
. Il fait la fierté de Cahors (Lot). Franchissant le Lot, il en impose avec ses trois tours et ses avant-becs crénelés. Une merveille de réalisation médiévale, à l’époque surtout destinée à protéger la ville des attaques et l’une des plus belles réalisations médiévales encore existantes en France. On le surnomme aussi « le pont du Diable » : on raconte que pour accélérer les travaux d’une lenteur exaspérante, le maître d’œuvre aurait signé un pacte avec Satan !
Le viaduc de Garabit
. Gustave Eiffel n’a pas réalisé que la célèbre tour emblématique de Paris. L’ingénieur s’est attelé à de nombreux ponts, dont le viaduc de Garabit, au-dessus des gorges de la Truyère (Cantal), demeure le plus connu, même si c’est l’ingénieur Léon Boyer qui en est initialement à l’origine. Il servit d’étude pour la préparation de la Tour Eiffel. Ce pont métallique était destiné au chemin de fer sur la ligne Paris-Béziers. Avec ses 564 mètres de long, à 122 mètres au-dessus de la rivière, il sera le plus haut viaduc du monde. Construit entre 1880 et 1884, il est toujours utilisé par les trains.
Le pont de l’île de Ré
. Relier le continent aux îles, un vieux rêve… Avant de construire le tunnel sous la Manche entre France et Angleterre, on avait envisagé un pont. En Charente-Maritime, relier le continent à l’île de Ré a aussi animé les débats pendant longtemps. En 1988, le voici enfin en service : avec 2.926,50 mètres de long, une largeur de tablier de 15,50 mètres, ce pont est aujourd’hui le deuxième plus long de France, derrière celui de Saint-Nazaire. Plus de 3 millions de véhicules l’empruntent chaque année, et le visage de l’île en a été transformé avec un afflux touristique et une augmentation du foncier.
Le pont mégalithique de Lablachère
. Rien ne prouve qu’il date de deux millénaires, il ne permet pas d’aller très loin, mais ce pont a une allure unique. Situé à Lablachère, en Ardèche, le pont « mégalithique » franchit juste un ruisseau, le Masseloup. Des dalles verticales, monolithiques, sont posées à même le sol et supportent des plaques horizontales de grès sur 16 mètres, qui permettent de franchir le ruisseau en cas de fortes pluies. Une prouesse d’un autre temps.
Le Viaduc de Millau
. Bien plus récent, le Viaduc de Millau est construit en 2004 dans l’Aveyron. Signé Norman Foster et Michel Virlogeux, il compte parmi les plus designs et majestueux de France. Haut de 343 mètres, on le reconnait notamment grâce à ses grands câbles suspendus qui rappellent presque des ailes d’oiseau. D’ailleurs, lorsque les nuages descendent dans la vallée du Tarn, le pont semble flotter dans les airs. Inutile de dire que le viaduc a reçu de nombreux prix internationaux d’architecture.