Méridien de Greenwich et fuseaux horaires

.            Un méridien est un demi-cercle imaginaire autour de la Terre rejoignant ses deux pôles. Par convention on décida qu'il y en aurait 360 et que celui passant par Greenwich en Angleterre serait l'origine de la mesure des longitudes.

Au fil des temps, de nombreux pays avaient défini leur propre origine pour mesurer les longitudes. On en compta une bonne vingtaine, Washington, Madrid, Stockholm, Paris, l'île de fer (la plus petite et la plus occidentale des Iles Canaries), … et il fallut attendre la "Conférence internationale du méridien de Washington" en octobre1884 pour que l'on se mette d'accord sur une définition commune.

Les trains imposent l’heure unique

.            Au XIXe siècle, si la durée d’une heure est désormais la même partout, chaque localité a sa propre heure, calculée à partir des observations du soleil faites sur place. Lorsqu’il est midi à Strasbourg, il n’est que 11h12 à Brest, la Terre tournant sur son axe d’est en ouest à la vitesse de 1.600 km/h.

Dans le monde préindustriel, largement sédentaire où l’on se déplace à cheval, cela ne prête guère à conséquence. Les trajets effectués sur de longues distances sont trop lents pour nécessiter une synchronisation des heures. Mais au milieu du XIXe siècle l’émergence du chemin de fer va brusquement changer la donne.

Les différences d’heure locale s’avèrent en effet un problème pour les horaires de trains. Pour ne pas avoir à changer d’heure dans chaque gare, les compagnies de chemins de fer britanniques décident en 1840 de régler toutes leurs horloges sur l’heure de Londres. L’horaire des chemins de fer servira de référence aux Anglais qui en moins de vingt ans abandonnent l’heure solaire locale.

Les horloges de la Tour Big Ben (Londres) ont été mises en marche en mai 1859. _ Une des deux horloges de la façade de l'ancienne gare d'Orsay, aujourd'hui le musée d'Orsay à Paris. Paris-Orléans (P-O) est le nom de la compagnie de chemins de fer d'origine.

En France, la transition sera plus laborieuse… S’inspirant des Britanniques, les compagnies de chemin de fer imposent l’heure de Paris. Chaque gare se dote alors de deux horloges : une indiquant l’heure locale, l’autre celle de la capitale. Parfois, le cadran comporte deux aiguilles des minutes, une dorée symbolisant l’heure solaire et une noire pour l’heure parisienne.

Pour compliquer le tout, les compagnies de chemins de fer décident de retarder tous les trains de cinq minutes sur l’horaire officiel pour éviter d’éventuelles réclamations des voyageurs ! Cet horaire informel sera surnommé « l’heure de Rouen ».

Il faut attendre 1891 pour qu’une loi fasse de l’heure de Paris la seule heure légale du pays.

Pourquoi Greenwich ?

.           La question qui divise portait sur le choix du méridien de référence (méridien international zéro). Il y avait principalement deux prétendants, Paris et Greenwich, chacune de ces villes disposant de laboratoires astronomiques réputés.

Le laboratoire de Paris ne manquait toutefois pas d'atouts ; par exemple son méridien avait déjà été utilisé (comme une vingtaine d’autres d’ailleurs) au cours de l'histoire. Surtout, c'est à partir de la longueur du méridien de Paris qu'avait été défini le mètre comme unité de longueur : la dix millionième partie d'un quart du méridien terrestre. Paris a donc tenté de placer son méridien comme référence … tout autant que l’île espagnole de Fer (El Hierro) aux Canaries !

Salle méridienne de l'Observatoire de Paris (XIVe arr.), dite salle Cassini : le méridien de Paris y est tracé au sol. _ Carte de la France corrigée par ordre du Roy sur les observations de Mss. de l'Académie des Sciences d'après les travaux de Picard, La Hire et Cassini Ier. Il s'agit de la première carte montrant le méridien de Paris, présentée à l'Académie en 1683 et publiée en 1693.

Le méridien de Greenwich (du nom de l’observatoire éponyme, dans la banlieue de Londres, fondé au XVIIe siècle) est finalement choisi comme origine, de longitude 0°, au grand dam des Français. En contrepartie de l'adoption du méridien de Greenwich, les Britanniques se sont engagés à adopter le système métrique (!), en adhérant à la Convention du Mètre la même année … Deux motifs semblent avoir été décisifs :

  • Deux tiers des flottes navales mondiales, dont l'américaine, utilisaient déjà le méridien de Greenwich.
  • Le système de fuseaux horaires, basés sur le méridien de Greenwich, adopté l’année précédente par les États-Unis pour les compagnies ferroviaires américaines donnait satisfaction.

Méridien de Greenwich dans l'hémisphère nord, Johannes Kalliauer. _ L'arc de méridien d'Europe-Afrique de l'ouest s'étendant des îles Shetland, en passant par la Grande-Bretagne, la France et l'Espagne jusqu'à El Aghuat en Algérie, dont les paramètres ont été calculés à partir de triangulations réalisées au milieu et à la fin du XIXe siècle, Encyclopædia Britannica, vol. 8, 1911.

En France et chez certains pays d'Afrique du Nord, le méridien de Paris est toujours utilisé comme origine des longitudes, pour les coordonnées exprimées en grades, dans le système de référence géodésique français NTF4.

Une confusion remarquable : dans le "Trésor de Rakham le Rouge" d'Hergé, le capitaine Haddock confondit Paris et Greenwich et ne dut qu'à Tintin de trouver l'épave de la Licorne, le vaisseau du chevalier de Hadoque, son ancêtre.

Méridien de Greenwich ... mais lequel ?

.            A l'origine, depuis 1773, le méridien passait par la lunette méridienne d'un certain James Bradley. Mais une nouvelle lunette fut mise en place par Sir George Airy en 1850 dans une salle voisine, 13 mètres plus à l'est ; et c'est cette seconde position, dont la longitude, est par définition égale à 0°, qui sert de référence internationale depuis octobre 1884.

Ce « méridien origine » passe donc à travers l'Observatoire royal de Greenwich (banlieue sud-est de Londres), au Royaume-Uni. Il rencontre le continent européen à Villers-sur-Mer (Calvados). Avec le 180e méridien qui lui est directement opposé, il définit les hémisphères est et ouest.

Pourtant un autre méridien doit être considéré, situé à une centaine de mètres des précédents, en raison d’un décalage suite à une erreur de mesure que les outils de l'époque n'avaient pas la capacité de percevoir. Il est la référence (IRM = « International Reference Meridian »), par exemple, pour le système de géolocalisation GPS, le système géodésique WGS 84, pour toutes les cartes marines de l'organisation hydrographique internationale depuis 1983 et, également, pour la navigation aérienne par l'organisation de l'aviation civile internationale depuis 1989.

Pour sa propre cartographie, la Grande-Bretagne continue de faire référence à la lunette de Bradley. Les cartes de l'Ordnance Survey (chargé de la cartographie du pays, il produit des cartes uniquement pour la Grande-Bretagne, ainsi que pour l'île de Man) sont ainsi toujours décalées de 0,417 seconde d'arc (correspondant aux 13 mètres) à l'ouest du méridien international.

Les fuseaux horaires.

.            Une fois le méridien d’origine défini, il est vrai tout à fait arbitrairement, il fallait s’occuper du reste du monde. À la fin du XIXe siècle, si l’heure solaire a disparu à peu près partout au profit de l’heure légale, la synchronisation de l’heure se heurte encore à deux problèmes :

  • Les heures restent différentes d’un pays à l’autre, freinant les échanges inter-frontaliers.
  • Certains pays sont trop vastes pour adopter une heure unique : États-Unis, Russie, Canada, Australie.

Les compagnies de chemin de fer américaines et canadiennes finissent par créer en 1883 cinq zones horaires entre le Pacifique et l’Atlantique. Parallèlement, le géographe canadien Sandford Fleming propose de diviser le globe en 24 fuseaux horaires de 15 degrés de longitude. De cette manière, au sein d’un même fuseau, la différence entre l’heure solaire et l’heure officielle n’excédera pas 30 minutes.

L’écossais Sandford Fleming proposa en 1879 de diviser le globe en 24 zones de 15° de longitude. En octobre 1884, l’International Meridian Conférence qui rassemble 25 pays à Washington, adopte le partage du globe en 24 fuseaux. Les 360 méridiens de 1° furent répartis en 24 fuseaux horaires (englobant donc chacun 15 méridiens), autant qu'il y a d'heures dans une journée correspondant à la rotation de la Terre sur elle-même. Le fuseau horaire détermine une zone plus ou moins arbitraire de la surface terrestre dans laquelle on définit une heure uniforme en tout lieu. Le premier fuseau horaire est à cheval sur le méridien de Greenwich.

.            Chaque pays doit donc adopter l’heure du ou des fuseaux dans le(s)quel(s) il est situé. Intégrée au fuseau du Royaume-Uni, la France est contrainte d’aligner toutes ses horloges sur celles de Londres. Mais, mauvais joueurs, les Français attendront 1911 pour abandonner définitivement l’heure de Paris. Pas question pour autant de reconnaître Greenwich, fierté nationale oblige : la loi précise que l'heure légale en France sera désormais « l'heure de l’observatoire de Paris, retardée de 9 minutes 21 secondes ». Les plus chauvins prendront un malin plaisir à parler du méridien d'Argentan (Orne) ou de La Flèche (Sarthe), tous deux situés à la même longitude que l’observatoire londonien !

Ces fuseaux ont tendance à suivre les frontières des pays ou de leurs subdivisions. Généralement, ils diffèrent du temps universel coordonné, d'un nombre entier d'heures, mais quelques-uns sont décalés de 30 ou 45 minutes (Iran, Inde, Australie Centrale, Népal, …).

Un pays peut adopter une heure autre que celle de l’heure solaire qui lui serait destinée a priori. C'est le cas de l'Espagne continentale ou de la France métropolitaine qui sont à l'heure de l'Europe centrale, donc en avance d'une heure sur le fuseau dans lequel se trouve la plus grande partie de leur territoire. À l'extrême, certains pays peuvent même, bien que recouvrant un nombre significatif de fuseaux, adopter une seule et unique heure légale : c'est le cas notamment de la Chine. Aux latitudes élevées, certains pays font en plus usage d'une heure d'été pendant une partie de l'année, modifiant ainsi leur fuseau horaire. Dans les régions polaires, les stations scientifiques dans l'Arctique et en Antarctique utilisent généralement le fuseau horaire de leurs bases de ravitaillement. Ainsi, la station Amundsen-Scott, située au Pôle Sud, utilise le fuseau horaire de la Nouvelle-Zélande UTC +12 pendant l'hiver austral, UTC +13 pendant l'été austral.

Montre de poche, cadran 24 heures avec indication de l'heure universelle, Béguelin, Tramelan, fin XIXe siècle. _ Horloges mondiales à Parque do Pasatempo, Betanzos, Galice (Espagne).

Histoire

.            Le temps moyen de Greenwich (Greenwich mean time, GMT) fut établi en 1675, à la construction de l'Observatoire royal de Greenwich, afin d'aider les marins à déterminer leur longitude en mer. La première zone du monde possédant un temps uniforme fut instaurée par les chemins de fer britanniques le 1er décembre 1847, à l'aide de chronomètres synchronisés et transportés à la main. En août 1852, des signaux temporels furent transmis par télégraphe depuis l'Observatoire Royal, et en quelques années, la presque totalité des horloges publiques de Grande-Bretagne utilisaient GMT, bien que celle-ci ne fut adoptée comme heure légale que le 2 août 1880. Certaines horloges de cette période possèdent deux aiguilles des minutes : l'une pour l'heure locale, l'autre pour l'heure GMT.

.            Le système des fuseaux horaires avait en réalité été proposé dès 1858 par le mathématicien italien Quirico Filopanti qui se référait au méridien de Rome. Par la suite, l’ingénieur et géographe montréalais Sandford Fleming en 1876 proposa, tout en gardant le méridien de Greenwich comme origine des temps, la ligne de changement de date au méridien 180° (est et ouest), et la division du globe en 24 fuseaux horaires de même taille.Le 2 novembre 1868, la Nouvelle-Zélande (alors colonie britannique) adopta officiellement une heure standard destinée à être observée dans toute la colonie, probablement le premier pays à le faire.

Aux États-Unis, la mesure du temps sur les chemins de fer du milieu du XIXe siècle était confuse. Chaque compagnie utilisait son propre standard, généralement basé sur son siège social ou un terminus important, et les horaires étaient publiés en concordance. Certaines jonctions importantes, partagées par plusieurs compagnies, possédaient une horloge distincte par chemin de fer, avec sa propre heure ; la gare centrale de Pittsburgh en Pennsylvanie, par exemple, utilisait six heures différentes.

William F. Allen proposa un système standard de fuseaux horaires pour les chemins de fer américains. Les frontières de ces zones passaient par les gares, souvent dans des villes importantes. Son système, qui précisait 5 zones horaires, fut adopté le dimanche 18 novembre 1883, également appelé « journée des deux midis », lorsque l'horloge de chaque gare fut remise à l'heure de son fuseau lorsque celle-ci atteignit midi. Au bout d'un an, 95 % de toutes les villes de plus de 10.000 habitants (soit 200 villes) utilisaient ce système.

En octobre 1884, la Conférence Internationale du Méridien adopta un temps universel de 24 heures, débutant à minuit à Greenwich.

.            En 1929, la plupart des pays avaient adopté des fuseaux horaires en décalage d'un nombre entier d'heures par rapport à GMT. Ainsi, alors que la loi française du 14 mars 1891 unifie l'heure sur l'ensemble de l'Hexagone en adoptant « l'heure légale temps moyen de Paris », celle du 9 mars 1911 impose le méridien de Greenwich, la France renonçant à imposer le méridien de Paris comme référence temporelle et point de départ des fuseaux horaires.

La France, recordwoman avec ses 13 fuseaux horaires (La Russie, seconde avec 11).

Ses nombreux territoires outre-mer font de la France le pays couvrant le plus grand nombre de fuseaux horaires au monde. Treize en tout !

Lorsqu’il est 12h00 à Paris il est :

- 02h00 à Tahiti

- 02h30 aux îles Marquises

- 03h00 aux îles Gambier

- 04h00 à l’île de Clipperton

- 08h00 en Guadeloupe et en Martinique

- 09h00 en Guyane

- 15h00 à Mayotte

- 16h00 à La Réunion

- 17h00 aux îles Kerguelen

- 22h00 en Terre Adélie

- 23h00 en Nouvelle-Calédonie

- 00h00 à Wallis et Futuna

La ligne de changement de date.

.            En considérant la Terre ronde, la nécessité d'une ligne de changement de date avait été mise en évidence dès le XIe siècle. Mais la première manifestation du phénomène apparut lors de la circumnavigation de Magellan (1519-1522) : les rescapés de l'expédition qui se trouvaient sous les ordres du capitaine Elcano à bord de la "Victoria" débarquèrent en Espagne, après 3 ans de tour du monde, un Mercredi selon le journal de bord réputé parfaitement tenu à jour alors qu'on était un Jeudi pour les terriens. Le problème provoqua des débats, jusqu'à envoyer une délégation spéciale auprès du pape Léon X pour le lui expliquer.

Phileas Fogg, le héros de Jules Verne, après avoir fait le tour de la Terre en 80 jours, crut avoir "perdu" son pari d'une journée, jusqu'à ce qu'il réalise qu'ayant parcouru les 24 fuseaux horaires, il avait en fait "gagné" une journée... et son pari.

.            Quiconque fait, comme Phileas Fogg, un tour complet de la Terre gagne ainsi une journée, mais la date est une référence commune à la planète et il a fallu définir une ligne générale pour le changement de date, ce fut le méridien 180, dans le Pacifique à l'opposé de celui de Greenwich. En réalité, il s'agit plutôt d'une ligne imaginaire brisée pour éviter un changement de date dans un petit territoire.

On fera remarquer que deux petits îlots dans le bras de mer situé entre l'Alaska et la Russie. L'un est russe, l'autre américain et en dépit des quelques kilomètres qui les séparent, ils n'ont pas la même date.

De l’heure anglaise à l’heure allemande

.            Pendant près de 30 ans, Paris et Londres vont être à la même heure, c’est-à-dire GTM (Greenwich Mean Time ou « Temps Moyen de Greenwich »). Les choses changent brutalement en juin 1940 avec l’invasion allemande. L’une des premières décisions de l’occupant est d’aligner l’heure de Paris sur celle de Berlin, c'est-à-dire GTM+1. Dans un premier temps, la zone libre conserve l’heure française, si bien qu’à Vichy il est une heure plus tard qu’à Paris !

Ce décalage horaire entre les deux zones n’est pas sans poser des problèmes logistiques : les trains provenant de la zone libre circulent avec une heure de retard dans la zone occupée, tandis que ceux venant de la zone occupée sont contraints d’attendre une heure à la ligne de démarcation.

Pour mettre fin à cette absurdité, le gouvernement de Vichy accepte d’aligner son heure sur celle de l’occupant en février 1941. Toute la France se retrouve donc « à l'heure allemande », selon l’expression popularisée par le roman de Jean-Louis Bory, Mon village à l'heure allemande.

À la Libération, pour des raisons demeurées obscures, le retour de la France dans le fuseau horaire de Greenwich est annulé, la reconstruction du pays étant prioritaire. Depuis cette date, et construction européenne aidant, l’Hexagone vit à l’heure de l’Europe centrale, soit une avance d’une heure sur le soleil.

.            La France n’est pas le seul pays à être dans le mauvais fuseau horaire. Depuis 1942, l’Espagne se trouve elle aussi à l’heure de Berlin, décision prise par Franco pour des raisons évidemment politiques.

En Chine, la situation est plus sidérante encore, le pays ayant choisi d’adopter une heure unique pour tout son territoire. Les habitants des provinces de l’ouest (Tibétains et Ouïghours) sont donc soumis à l’heure de Pékin, 2.500 kilomètres à l’est !

L’heure d’été

.            Durant la Première Guerre mondiale, pour réaliser des économies d’énergie, l’Allemagne invente le passage à l’heure d’été.

Carte postale sur le changement d'heure en Allemagne en 1916. _ Passage à l'heure d'été au central horaire de la gare de Paris-Saint-Lazare en 1937, Agence Meurisse, Paris, BnF.

Durant six mois, le temps est alors avancé d’une heure pour gagner une heure de lumière en soirée. La mesure est rapidement adoptée par l’Angleterre et la France puis par un grand nombre de pays.

Abandonnée après la Seconde Guerre mondiale, l’heure d’été est finalement rétablie en France en 1976 à la suite du premier choc pétrolier, afin de réduire la facture énergétique. La mesure est censée être provisoire. Elle subsiste pourtant un demi-siècle plus tard. Entre-temps, l’heure d’été sera étendue à l’ensemble des pays de l’Union Européenne, gagnant même un mois depuis 1995.

En conséquence, les Français vivent désormais sept mois sur douze à l’heure d’Odessa, soit avec deux heures d’avance sur le soleil. Ce décalage n’est pas sans poser certains problèmes, en particulier sur le sommeil, le coucher de soleil tardif ayant tendance à retarder l’endormissement. Raison pour laquelle Français et Espagnols se lèvent en moyenne plus tard que leurs voisins. Pour Madrid, ce décalage horaire pénaliserait même l’Espagne en termes de croissance et de productivité.

Le choix d’abandonner l’heure d’été et/ou de revenir dans le fuseau horaire de Greenwich sera peut-être en France comme en Espagne l’enjeu politique (et même géopolitique depuis le Brexit) inattendu des prochaines années.

Petites histoires d’heure !

On n’est pas le même jour sur les deux îles Diomède

.            Quand les habitants russes de la g Les deux îles, distantes de 3 kilomètres, sont situées de part et d’autre de la ligne de changement de date dans le Pacifique. La traverser permet de faire un bond dans le calendrier : un jour en moins dans le sens ouest-est, un en plus dans l’autre sens. Son tracé est d’ailleurs tortueux car les pays concernés peuvent choisir leur fuseau horaire.

Le 16 août 1728, le navigateur dano-russe Vitus Bering a découvert les deux Iles Diomède. Cette date est celle de la célébration de la mémoire de saint Diomède par l’Eglise orthodoxe russe. C’est la raison pour laquelle les îles portent son nom.

Grande Diomède et Petite Diomède sont séparées par 5 km de mer. En hiver, il se forme un pont de glace qui permet aux deux îles d’être reliées. Ainsi, il est possible de passer facilement de l’une à l’autre. La plus grande des deux, Grande Diomède, coté Sibérie est incluse dans le territoire russe, tandis que Petite Diomède, coté Alaska, se trouve du côté américain.

Elles sont séparées par la ligne de changement de date internationale qui traverse l’Océan Pacifique, créant ainsi cette situation insolite, où l’on peut littéralement « voyager dans le temps ». Quand les Russes de Grande Diomède s’apprête à fêter la nouvelle année le 31 décembre à 23 h 59, les Américains de Petite Diomède doivent encore … 1 an pendant 24 heures.

Petite Diomède est toujours habitée et compte actuellement 110 habitants américains environ. Quant à Grande Diomède, seules des unités militaires russes y sont présentes, la population indigène ayant été transférée en Russie continentale par le gouvernement soviétique ; puis au début de la guerre froide, dans les années 1950, ces mêmes habitants qui vivaient en URSS Russie ont été déplacés de force en Sibérie avant que le gouvernement ne ferme la frontière.

Quand les trains partaient toujours en retard

.            Certains règlent leur montre avec cinq minutes d’avance pour ne jamais être en retard ou rater leur train. Au XIXe siècle, en France, les chemins de fer reculaient de cinq minutes les horloges des quais (mais pas celles du reste de la gare). Comme les cheminots consultaient ces pendules avant de démarrer, les retardataires avaient le temps de sauter dans les wagons ! Pourquoi une telle prévenance ? Jusqu’à la fin de ce siècle, il existait encore de nombreuses heures locales sur le territoire et l’administration des chemins de fer craignait que les voyageurs soient perdus dans cet imbroglio horaire … En 1826, à Paris, « l’heure moyenne » remplace l’heure solaire – celle donnée par les cadrans solaires, trop variable selon les lieux. En effet quarante-neuf minutes séparent le zénith strasbourgeois (le midi solaire) du brestois. Quelques villes adoptent cette heure unique (qui résulte d’un calcul mathématique), mais les campagnes résistent et il faut attendre 1891 pour unifier l’heure. À Paris, certains regrettent « l’heure vraie », calée sur le soleil. Depuis 1786, dans les jardins du Palais-Royal, un petit canon tonne chaque jour à midi quand l’astre est à son zénith… Une réplique trône aujourd’hui dans le parc, et un artificier déclenche le tir chaque mercredi.

Pourquoi nos horloges se sont-elles arrêtées neuf minutes le 10 mars 1911 ?

.            Les Français ont perdu la bataille du temps : le 10 mars 1911, ils arrêtent leurs pendules pendant neuf minutes et vingt et une secondes pour s’aligner sur l’heure anglaise. Au siècle précédent règne un chaos horaire puisque chaque pays a sa propre heure. Alors que les liaisons ferroviaires se développent, un peu de coordination s’impose. Reste à choisir un méridien de référence. Lequel retenir ? Paris ou Greenwich (près de Londres) ? « Ce dernier est privilégié car il est situé près d’un observatoire et les marins s’en servent pour calculer leur position », souligne Denis Savoie. Les Français ne l’entendent pas de cette oreille. En 1884, lors d’une conférence à Washington, ils proposent même un méridien « neutre ». En vain. Mauvais perdants, ils boudent et restent à l’heure de Paris… jusqu’en 1911. En effet, la tour Eiffel étant devenue une antenne radio à même de transmettre en longue distance, il leur faut se mettre au diapason du reste du monde. Avant l’heure, c’est pas l’heure !