Les origines de la fête de Noël
Tous les ans, la magie de Noël s'empare de nos foyers.
Au moment du solstice d’hiver, des fêtes préexistèrent au Noël chrétien. Ainsi les Saturnales (fêtes en l'honneur de Saturne) et la fête de Mithra (dieu perse de la lumière) qui célébraient la naissance du Soleil le 25 décembre, ou les calendes de janvier, où l’on offrait des étrennes en accrochant du laurier sur sa porte. Mais certaines théories selon lesquelles Noël devrait beaucoup à ces fêtes antiques sont toutefois discutables.
Sitôt que le christianisme est devenu religion officielle de l'Empire romain (édit de Milan, 13 juin 313), le clergé a eu soin de christianiser les traditions païennes. Il semblerait donc que les raisons pour lesquelles les chrétiens ont finalement choisi d’adopter Noël n’ont pas grand-chose à voir avec l’existence d’autres fêtes, païennes. Il semblerait que ce soient plutôt des raisons théologiques, pour arrêter une hérésie qui voyait dans le baptême du Christ par Jean-Baptiste le moment inaugural où Dieu l’adopte, que l’Église de Rome ait décidé de fêter la naissance de l’Enfant Dieu.
Depuis quand fête-t-on Noël ?
Les Évangiles de l’enfance de Jésus ne donnent pas de date de sa naissance. L’Église primitive étant focalisée sur la Passion et la Résurrection, il faudra attendre, en 354, le pape Libère pour que la Nativité de Jésus devienne une grande fête du calendrier liturgique le 25 décembre.
Cette date coïncide avec une période de fêtes bien connue à Rome et dans l’empire, autour du solstice d’hiver dans l’hémisphère nord (le 21 décembre, à un jour près), et ce n’est pas un hasard. Alors que la durée du jour est au plus bas, on fêtait les Saturnales qui se déroulaient primitivement le 17 décembre, mais qui, à la fin de l’Empire, s’étendaient sur 7 jours, donc jusqu’au 24, et la renaissance du Soleil invaincu. La célébration du Christ comme « Soleil de justice » (cf. Malachie 3, 20), infléchit une coutume, sans la bouleverser.
Puis désireux de mettre un terme aux querelles de la fixation de la date de Pâques qui agitent l'Église, quelques moines se mettent en quête d'une passerelle entre le calendrier lunaire des juifs et le calendrier solaire des Romains. C'est ainsi qu'en 532 de notre ère, au temps de l'empereur Justinien, un moine scythe réfugié à Rome, Denis le Petit, situe l'année de la naissance du Christ 753 ans après la fondation de Rome, l'année de référence des anciens Romains.
Cela dit, on pense aujourd'hui qu'il s'est trompé et que le le Christ serait né entre l'An 3 et l'An 6 avant l'ère chrétienne.
La fête chrétienne se greffe sur les célébrations païennes
Effectivement la nouvelle fête de Noël assume des pratiques des fêtes païennes. Lors des Saturnales, des banquets réunissent les familles, où les esclaves mangent avec les maîtres. La profusion de la nourriture y évoque l’abondance espérée pour les mois qui viennent ; on offre des étrennes –figues et miel– dont la suavité symbolise l’espérance d’une douce année nouvelle. Ce moment est perçu comme un véritable basculement de l’année. Quand la plupart des arbres sont dépouillés de leurs feuilles, on introduit de la verdure dans les maisons, notamment du houx, du gui, du lierre.
Au IIIe siècle, en Afrique du nord, le théologien Tertullien aura beau se fâcher (« Vous décorez vos maisons de verdure et de chandelles comme les païens »), ces pratiques sont parvenues jusqu’à nous …
Mais fondamentalement, la symbolique des mythes romains n’aurait rien à voir avec celle de la fête chrétienne, laquelle révolutionne la conception du don, du sacrifice, de la lumière, et bouleverse la façon d’envisager l’enfant, souvent alors considéré comme une menace par les rois, dieux ou pères de l’Antiquité. Pierre Chrysologue (~406-450), archevêque de Ravenne, la nouvelle capitale de l’Empire romain d’Occident, dans son Sermon Sermon 158, inouï à cette époque : « De quelle barbarie la petite enfance ne triomphe-t-elle pas ! quelle brutalité n’adoucit-elle pas ! (…) Que n’exige-t-elle pas en fait d’amour ! quelle tendresse n’obtient-elle pas ! Cela, les pères le savent, les mères le ressentent, le cœur des hommes l’atteste. C’est donc ainsi qu’a voulu naître Celui qui a voulu être aimé et non faire peur. »
Aujourd’hui, Noël est perçu comme une fête de la famille, au-delà des cercles chrétiens …
À vrai dire, l’étude des coutumes de Noël –la place des enfants, les cadeaux, …– dans les provinces françaises montre l’ancienneté et la permanence de croyances bien antérieures au développement de la foi chrétienne, et leur dimension sacrée. Ce sont sans doute les liens précoces entre le profane et le sacré, autour de l’Enfant Jésus, qui expliquent en partie la pérennité, jusqu’à nos jours, de la fête de Noël.
Noël a eu des ennemis : en Angleterre, au XVIe, les autorités protestantes tentent de l’éradiquer. Les puritains en Amérique seront encore plus intransigeants : dans le Massachusetts, en 1670, fêter Noël est passible d’amende. Avant la Première Guerre, les libres penseurs français s’y essaieront aussi, proposant de célébrer à la place « l’éternelle nativité de la pensée révolutionnaire ».
Noël peut être difficile à vivre pour les personnes seules. C’est également une fête de la générosité. À Noël, on ouvre son portefeuille et son cœur.
La crèche.
La crèche est née avec le christianisme puisqu'elle est évoquée dans les premiers écrits des évangélistes. C'est Luc qui y fait directement allusion, expliquant que Marie et Joseph, venus à Bethléem pour être recensés, n'avaient pu trouver place dans la salle commune de leur hôte. Celui-ci les avait installés dans la pièce inférieure, affectée aux animaux. Une version tardive du IIe siècle a fait de cette étable une grotte. L'enfant Jésus aurait donc été placé, dès sa naissance, dans la mangeoire pour bestiaux, désignée en allemand par le mot krippe qui a donné, au XIIe siècle, notre « crèche ».
Le mot « crèche » désigne donc la mangeoire où reposait selon la tradition l'enfant Jésus, faute de lit mieux approprié. La crèche de Bethléem a bien sûr disparue. Mais certains fragments du Saint Berceau auraient cependant été conservés et rapportés par des pèlerins dans la basilique Sainte-Marie-Majeure de Rome, où dès 432, le pape Sixte III avait créé une copie de la Grotte.
S’il a fallu attendre le XIXe siècle pour qu’elles se répandent au sein des foyers, on en trouve des crèches dès le Ve siècle dans le chœur de certaines églises où des poupées incarnent les personnages de la Nativité.
À l'origine, la crèche n'est qu'un outil, un décor rendant plus réalistes et frappantes les représentations « théâtrales » organisées à l'intérieur, puis à l'extérieur des églises. On invente ensuite les crèches vivantes, jouées par des fidèles, une tradition antérieure à François d’Assise, auquel on en attribue parfois la paternité. Il s'agit de mettre en scène sous forme de tableaux vivants les différents épisodes de la vie du Christ afin de les enseigner au peuple illettré.
Se rendant compte de l'efficacité du procédé, c’est bien François d'Assise et ses frères, qui ont popularisé l'idée, en 1223, de faire jouer la Nativité par les habitants de Greccio dans un cadre naturel, en leur faisant tenir le rôle des personnages bibliques. Son exemple fut suivi dans toute la chrétienté, y compris en France sous la forme de drames liturgiques puis de représentations pieuses appelées « mystères ».
Se développe alors toute une riche littérature théâtrale qui met en scène la Nativité. À partir du XIIIe siècle, ces spectacles en langue vulgaire, très populaires, qui mêlaient le drame et le burlesque, le profane et le sacré, sont poussés hors des églises, renvoyés sur les parvis.
L'époque baroque est pour elles le temps de la multiplication des personnages et de l'exubérance sans limite : dans la région de Naples, toutes les grandes familles se disputent l'honneur de posséder le plus bel exemplaire de presepe (mot italien pour une « étable ») !
Au XVIe siècle, on essaie de les encadrer. S'éloignant par trop de la morale religieuse, elles furent interdites en 1548 à Paris. Puis Louis XIV supprimera carrément les confréries qui les organisaient. Se répandent alors les crèches domestiques, composées de figurines maniables, peu chères dont la première mention date du XIIIe siècle, dans un monastère bavarois : elles deviennent un « outil catéchétique » cantonné aux églises.
Les santons
La Révolution, interdisant les manifestations publiques de croyance, fait rentrer les crèches dans les maisons. Ainsi au XIXe siècle, elle suscite à son corps défendant une nouvelle forme d'art populaire : les santons, (du provençal santoun : « petit saint »), des figurines en mie de pain qui permettent à chaque provençal de créer sa propre crèche dans l'intimité. Depuis, les bergers mentionnés par saint Luc y côtoient des éléments ajoutés par la tradition.
Leur succès est tel que, dès 1803, une grande foire leur est consacrée à Marseille, foire qui a toujours lieu aujourd'hui.
Au début du XIXe siècle, le sculpteur Jean-Louis Lagnel a l'idée de fabriquer les santons non plus en plâtre mais en argile, à partir de moules et donc reproductibles à volonté. À partir de 1914, ils s'habillent grâce à l'abbé César Sumien qui montre un vrai souci du détail. Artisanaux ou fabriqués à la chaîne, les santons de Provence se caractérisent encore aujourd'hui par leur grande variété et leurs couleurs vives.
La Sainte Famille
La crèche représente, bien évidemment, la Sainte Famille avec la Vierge en prière face à son enfant et Joseph, souvent un peu en retrait. La naissance dans la grotte ou l'étable est signe de dénuement, tandis que la paille rappellerait l'éphémère de la vie.
L’âne et le boeuf
À leur côté, voici l'âne, peut-être celui qui va leur permettre de fuir en Égypte, et son compagnon le bœuf, locataire de l'étable ; tous deux réchauffent l'enfant de leur souffle.
Symboles de douceur comme de force, ils ne sont apparus qu'au VIe siècle dans l'évangile apocryphe du pseudo-Matthieu, où ils tissent un rapprochement symbolique avec la Bible hébraïque. On peut lire en effet dans celle-ci un texte imprécatoire du prophète Ésaïe qui reproche au peuple d'Israël de s'être détourné de Dieu : « Un bœuf connaît son propriétaire et un âne la mangeoire chez son maître : Israël ne connaît pas, mon peuple ne comprend pas » (Ésaïe, 1:3).
Les visiteurs
Venus d'Orient selon l'évangéliste Matthieu, trois mages, sans doute des prêtres du culte perse de Mazda, présentent au nouveau-né leurs trésors contenant de l'or, de l'encens et de la myrrhe, symboles de royauté, de divinité et d'humanité.
Ce n'est qu'au VIe siècle qu'ils se voient attribuer un nom : Gaspard, le « roi maure », est le plus jeune, Balthazar est d'âge mûr et noir de peau et Melchior, vieillard à la barbe grise, est celui qui est agenouillé. Ils représentent les différents âges de l'Homme comme la diversité des peuples de la terre. Ils ont été guidés jusqu'à Bethléem par une étoile que certaines théories essaient de raccrocher à un phénomène astronomique avéré. On les représente souvent accompagnés de leurs chameaux, voire d'éléphants, pour la touche exotique.
À côté des rois prennent place les bergers qui auraient reçu en premier la nouvelle de la naissance, annonce faite par un ange souvent représenté parmi eux.
Selon les époques et les cultures, d'autres personnages participent à la scène, au point de retrouver toute la population du quartier ou du village, chats et poules y compris !
Pourquoi la messe de Noël est à minuit ?
La messe de Noël est un temps fort du calendrier liturgique chrétien. C’est l’occasion pour les catholiques de se recueillir afin de fêter ensemble la naissance de l’enfant Jésus. Traditionnellement célébrée le 24 décembre au soir, elle est aussi appelée « messe de Minuit » ou « messe de la Nuit ».
Au IVe siècle, les Romains célébraient le solstice d'hiver le 25 décembre, afin d'honorer la renaissance du Dieu soleil. Pour comprendre la signification de la messe de Noël, il faut remonter le temps jusqu'à l'an 336. Constantin, premier empereur chrétien, choisit de s'appuyer sur cette date symbolique pour fêter la naissance du Christ qui, elle aussi, apporte la lumière sur l'humanité. Et c’est en 354, pour rivaliser avec la fête païenne du solstice d’hiver, que l’Église instaure le 25 décembre comme jour anniversaire de la naissance du Christ.
Et la messe de Noël ? Elle apparaît au Moyen Âge. La première est donnée par le pape Grégoire à Rome, à minuit, dans la nuit du 24 au 25 décembre 590.
Mais pourquoi minuit ? La tradition veut que Jésus soit né à minuit. Cette heure a une portée symbolique forte : elle annonce un nouveau jour qui se lève. Au cœur de la nuit, les croyants célèbrent le passage de l'ombre à la lumière, comme l'annonçait déjà, dans la Bible, le prophète Isaïe: "Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière" (Is 9,1).
Trois messes pour fêter Noël
Si la messe de Minuit est la plus connue, il faut savoir qu'à l'origine, et jusqu’à il y a encore quelques décennies, la messe de Noël se déroulait en trois temps : la messe (basse) des Anges, la messe (chantée) des Bergers et la messe (basse) du Verbe divin. Chacune symbolise un des mystères de la Nativité. Aujourd'hui, elles existent toujours, mais elles ne portent plus le même nom.
Ainsi, la nuit de Noël s'ouvre par la messe de Minuit qui célèbre l'accomplissement de la promesse faite par Dieu au peuple hébreu: l'envoi d'un Sauveur. Ensuite, peu de temps après que l'église se soit vidée, la messe de l'Aurore commence et permet aux fidèles d'accueillir la lumière naissante de Jésus dans leur âme. Enfin, le lendemain, les chrétiens fêtent la naissance corporelle du Messie lors de la messe du Jour. Ces trois célébrations accompagnent les croyants dans l'accueil de la Bonne Nouvelle entre le soir du 24 et le matin du 25 décembre.
Les chrétiens sont invités à écouter la parole des anges et, comme les bergers, à aller à la rencontre de l'enfant Jésus pour répandre la joie. Une joie qui comme le rappelle l'Évangile selon saint Luc, sera "celle de tout le peuple: aujourd'hui vous est né un Sauveur, qui est le Christ Seigneur, dans la ville de David" (Lc 2, 11).
Une célébration d'exception
Plus d’un millénaire après sa création, la ou les messes de Noël -une célébration moins tardive, aux alentours de 19h, est souvent proposée aux familles- n'ont rien perdu de sa magnificence. Encore aujourd'hui, elle réunit des assemblées nombreuses bien au-delà du cercle des pratiquants. Autour de la crèche, au son des cantiques de Noël, chacun peut y retrouver son âme d'enfant. Et pour les croyants, y célébrer la joie d'accueillir la naissance du Christ.
De saint Nicolas ...
Attendue par toute la famille, la Saint-Nicolas est une tradition vivace le 6 décembre en Lorraine. Entre dévotion populaire à Saint-Nicolas-de-Port (Meurthe-et-Moselle) et fastueuses décorations à Nancy, un rendez-vous traditionnel
La fête pour les enfants
La vie posthume de saint Nicolas et sa réputation sont plus connues grâce aux légendes et histoires qui se sont forgées avec le temps. Il est facilement imaginable que sa bonté naturelle envers les pauvres et les enfants sont à l’origine de l’histoire que nous connaissons aujourd’hui.
Le « Bon St Nicolas » est aussi connu en Orient qu’en Occident, ce qui fait que chaque année à Bari (ville d’Italie où les reliques du saint ont été transférées pour échapper aux musulmans) catholiques et orthodoxes se retrouvent pour fêter St Nicolas.
En Occident il est considéré comme le saint patron des enfants grâce à la légende lorraine des trois enfants qu’il a ressuscités du saloir d’un boucher. Et d’une certaine manière l’ancêtre du Père Noël.
Comme le Père Noël, vêtu de rouge avec une longue barbe blanche, saint Nicolas apporte aujourd’hui aux enfants, dans la tradition, des cadeaux.
La veille de la Saint-Nicolas, les familles déposent des carottes au fond de leurs chaussures. Ce stratagème est censé tromper les enfants qui attendent la venue de l’évêque chargé de cadeaux : les carottes sont destinées à nourrir l’âne qui l’accompagne. Le lendemain, elles ont bien sûr disparu, et les enfants découvrent leurs jouets. En Lorraine, lors des deux derniers siècles, la Saint-Nicolas occupait une place plus importante que Noël.
Personnage énigmatique en pèlerine brune, le père Fouettard inquiète tous les enfants. Fidèle comparse de saint Nicolas, il est là pour effrayer ceux qui n’ont pas été sages durant l’année.
Sa légende remonte à 1552, lorsque les Messins assiégés par Charles Quint cherchaient à se divertir. Au matin du 6 décembre, la tradition veut qu’il distribue des coups de martinet aux garnements, ce qui est rare, car on leur pardonne s’ils se repentent.
Saint Nicolas
Saint-Nicolas est un personnage historique et légendaire, inspiré de Nicolas de Myre, évêque d'origine grec né en 270 à Patare dans la province romaine de Lycie (actuelle Turquie). On sait qu’il a participé au premier concile de Nicée en 325, et qu’il y a combattu l’arianisme (une théologie christologique non trinitaire qui affirme que Jésus-Christ est le Fils de Dieu le Père en tant que créature distincte du Père et qui lui est subordonnée). Nicolas de Myre s'est éteint dans sa ville, dont il était évêque, en 343.
Son histoire est à l'origine de nombreuses traditions, notamment la fête de la Saint-Nicolas, célébrée le 6 décembre dans plusieurs pays européens, où il est considéré comme le protecteur des enfants, des marins et des écoliers. Dans la tradition, il est souvent représenté comme un vieillard barbu, vêtu d'une mitre et d'une crosse, distribuant – accompagné du Père Fouettard – des cadeaux aux enfants sages, ce qui a inspiré la figure moderne du Père Noël.
Ses restes du ont connu un parcours complexe. Ils semblent d'abord avoir été inhumés dans l'église de Myre, construite en 520 au-dessus de l'édifice plus ancien où le saint chrétien aurait autrefois servi. Puis au XIe siècle, ils auraient été transférés dans la basilique San Nicola de Bari (Italie), ville côtière sur la route des pèlerins rejoignant Jérusalem, Rome ou Compostelle. Mais lors de la première croisade (1095-1099), une partie aurait également été emportée par des marins à Venise, où ils ont été conservés comme reliques sacrées dans l'église San Nicolò al Lido.
La légende des trois enfants
Un soir, trois enfants frappent à la porte de Pierre Lenoir, boucher, pour demander l’hospitalité. Il les accueille chez lui mais aussitôt les tue, et les coupe en morceaux pour les mettre dans son saloir et en faire du petit salé. St Nicolas passant par là demande l’hospitalité, ce que ne peut refuser Pierre Lenoir à un évêque, et une fois à l’intérieur demande du petit salé. Le boucher comprenant qu’il est démasqué avoue touti. St Nicolas étend alors trois doigts au-dessus du saloir et ressuscite les enfants. Le boucher quant à lui est condamné à accompagner toute sa vie St Nicolas sous le nom de Père Fouettard, punissant les enfants désobéissants.
Le Père Noël, drapé de rouge et de blanc, emprunté à St Nicolas ?
De St Nicolas (ou St Nikolaus ou encore Nikloos en Lorraine germanophone), il devient Santa Klaus. Ce qui donnera plus tard Santa Claus en anglais (transcription de la prononciation américaine de Sankt Niclaus) et c’est le nom que l’on attribuera au Père Noël. Il n’en fallait pas plus pour retrouver le lien entre les deux personnages. A l’origine les vêtements de l’évêque sont mauve et blanc. Mais rapidement ils changent dans la tradition pour le rouge et blanc.
Dans un poème (1822), Clement Clark Moore (*) écrira un texte qui devint fameux, The Night Before Christmas : « Dans toute la maison / Nul être ne bougeait, pas même une souris / Les chaussettes pendaient, près de la cheminée / Espérant la venue du bon saint Nick… » Il y fait de saint Nick un minuscule personnage, rond et jovial à l’habit « couleur de suie » venant en traîneau tiré par des rennes, et descendant dans les cheminées déposer des cadeaux. Plus de Père Fouettard à ses côtés ! Vers 1860, Thomas Nast a dessiné Santa Claus, le faisant venir du Pôle Nord. Ses habits étaient souvent rouges. Vers 1930, une campagne de publicité de Coca-Cola a fixé son image à travers le monde.
Et deux siècles plus tôt, en 1616, Christmas, his masque, une comédie burlesque de Ben Johnson, ami et rival de Shakespeare, avait mis en scène un Noël personnifié, un vieillard à longue barbe, en pourpoint et chausses, portant un haut chapeau.
(*) Clement Clarke Moore (1779-1863), est un protestant américain, professeur de théologie et de littérature grecque et orientale, ainsi qu'un poète. Il est l'auteur présumé du poème A Visit from St. Nicholas, qui a largement contribué à forger le canon moderne de la légende du père Noël dans sa version américaine.
La fête populaire
Dès le 22 novembre, la ville de Nancy propose des spectacles et des attractions gratuites. En point d’orgue, le défilé de la Saint-Nicolas offre 1,7 km de féeries lumineuses et sonores jusqu’à l’arrivée place Stanislas. Plusieurs compagnies professionnelles et des bénévoles du Grand Nancy paradent dans l’allégresse. Le froid et la pluie n’effrayent pas les badauds qui profitent du spectacle.
Chaque année, plus de 100 000 personnes viennent assister au défilé de la Saint-Nicolas. Sur la place Stanislas, la foule attend devant l’hôtel de ville de Nancy, là où le maire remet symboliquement « les clés de la ville » à saint Nicolas, patron des Lorrains. Ces festivités sont inscrites à l’inventaire français du patrimoine culturel immatériel.
En Lorraine, chaque commune organise ou participe à un défilé nicolaïen. Cette tradition est liée à la présence dans la région d’une relique de Nicolas de Myre. Dérobé en 1098 aux Italiens, l’os de phalange a été placé dans la ville de Saint-Nicolas-de-Port, suscitant un pèlerinage majeur qui se poursuit aujourd’hui. Rapidement il devient saint patron de la Lorraine.
Le samedi le plus proche du 6 décembre, une procession aux flambeaux se déroule en la basilique de Saint-Nicolas-de-Port. Compacte, la foule chante dans une ambiance fraternelle et recueillie.
La basilique de Saint-Nicolas-de-Port
Ce soir-là, on estime à près de 3 000 le nombre de participants, certains étant obligés d’attendre que les autres sortent pour entrer. Cette procession rend hommage à un miracle. Celui du sire de Réchicourt qui, pendant sa captivité en Orient, implora l’intercession de saint Nicolas. Après avoir été mystérieusement libéré et rapatrié sur le parvis de l’église en 1244, il ordonna qu’une procession y ait lieu tous les ans.
… au Père Noël
Quelque soit le pays, la fonction principale du père Noël est de distribuer des cadeaux aux enfants dans les maisons pendant la nuit de Noël.
Même si le mythe peut varier fortement d'une région à l'autre, notamment à cause du climat du 25 décembre qui peut aller du début de l'hiver dans l'hémisphère nord au début de l'été dans l'hémisphère sud, on imagine généralement le père Noël comme un gros homme avec une longue barbe blanche, habillé de vêtements chauds de couleur rouge avec un liseré de fourrure blanche ; des lutins l'aident à préparer les cadeaux. Il effectue la distribution à bord d'un traîneau volant tiré par des rennes.
Il entre dans les maisons par la cheminée et dépose les cadeaux dans des chaussures disposées autour du sapin de Noël ou devant la cheminée (en France), dans des chaussettes prévues à cet effet, accrochées à la cheminée (en Amérique du Nord et au Royaume-Uni) ou tout simplement sous le sapin. En Islande, il dépose un petit cadeau dans une chaussure que les enfants laissent sur le bord d'une fenêtre dès le début du mois de décembre. Au Québec, les cadeaux au pied du sapin sont de mise, en plus des « bas de Noël » disposés sur la cheminée dans lesquels on met les petites surprises.
Jusqu'au tournant du XXe siècle, le père Noël n'a que huit rennes (Tornade, Danseur, Furie, Fringant, Comète, Cupidon, Éclair et Tonnerre). Le neuvième, nommé Rudolph (Rodolphe en français), fut créé en 1939 par le poète Robert L. May dans un conte où le père Noël doit affronter des conditions météorologiques si mauvaises qu'il risque d'être en retard dans sa livraison de cadeaux. Dans cette histoire, il réussit à les distribuer grâce au nez lumineux de Rudolph qui l'orientait dans la tempête.
À partir du début du XXe siècle, différentes cartes-postales montrent le père Noël se déplaçant sans ses rennes : sur un traîneau tiré par des elfes, dans une montgolfière ou conduisant une motocyclette.
Le Père Noël supplicié (d’après Claude Lévi-Strauss, 1952)
Les fêtes de Noël 1951 auront été marquées, en France, par une polémique à laquelle la presse et l’opinion semblent s’être montrées fort sensibles et qui a introduit dans l’atmosphère joyeuse habituelle à cette période de l’année une note d’aigreur inusitée. Depuis plusieurs mois déjà, les autorités ecclésiastiques, par la bouche de certains prélats, avaient exprimé leur désapprobation de l’importance croissante accordée par les familles et les commerçants au personnage du Père Noël. Elles dénonçaient une « paganisation » inquiétante de la Fête de la Nativité, détournant l’esprit public du sens proprement chrétien de cette commémoration, au profit d’un mythe sans valeur religieuse. Ces attaques se sont développées à la veille de Noël; avec plus de discrétion sans doute, mais autant de fermeté, l’Église protestante a joint sa voix à celle de l’Église catholique.
« Le Père Noël a été pendu hier après-midi aux grilles de la cathédrale de Dijon et brûlé publiquement sur le parvis, ceci … avec l’accord du clergé qui avait condamné le Père Noël comme usurpateur et hérétique. Il avait été accusé de paganiser la fête de Noël et de s’y être installé comme un coucou en prenant une place de plus en plus grande. On lui reproche surtout de s’être introduit dans toutes les écoles publiques d’où la crèche est scrupuleusement bannie. »
Pourtant il est si joli de croire au Père Noël, cela ne fait de mal à personne … En fait, on fuit la question au lieu d’y répondre, car il ne s’agit pas de justifier les raisons pour lesquelles le Père Noël plaît aux enfants, mais bien celles qui ont poussé les adultes à l’inventer.
Depuis trois ans environ, c’est-à-dire depuis que l’activité économique est redevenue à peu près normale, la célébration de Noël a pris en France une ampleur inconnue avant guerre. Il est certain que ce développement, tant par son importance matérielle que par les formes sous lesquelles il se produit, est un résultat direct de l’influence et du prestige des États-Unis d’Amérique. Ainsi, on a vu simultanément apparaître les grands sapins dressés aux carrefours ou sur les artères principales, illuminés la nuit; les papiers d’emballage historiés pour cadeaux de Noël ; les cartes de vœux à vignette, avec l’usage de les exposer pendant la semaine fatidique sur la cheminée du récipiendaire ; enfin les personnages déguisés en Père Noël pour recevoir les suppliques des enfants dans les grands magasins. Tous ces usages qui paraissaient, il y a quelques années encore, puérils et baroques se sont implantés et acclimatés en France avec aisance et généralité.
Le Père Noël est vêtu d’écarlate : c’est un roi. Sa barbe blanche, ses fourrures et ses bottes, le traîneau dans lequel il voyage, évoquent l’hiver. On l’appelle « Père » et c’est un vieillard, donc il incarne la forme bienveillante de l’autorité des anciens. Tout cela est assez clair, mais dans quelle catégorie convient-il de le ranger, du point de vue de la typologie religieuse ? Ce n’est pas un être mythique, car il n’y a pas de mythe qui rende compte de son origine et de ses fonctions; et ce n’est pas non plus un personnage de légende puisqu’aucun récit semi-historique ne lui est attaché. En fait, cet être surnaturel et immuable, éternellement fixé dans sa forme et défini par une fonction exclusive et un retour périodique, reçoit un culte de la part des enfants, à certaines époques de l’année, sous forme de lettres et de prières; il récompense les bons et prive les méchants. La seule différence entre le Père Noël et une divinité véritable est que les adultes ne croient pas en lui, bien qu’ils encouragent leurs enfants à y croire et qu’ils entretiennent cette croyance par un grand nombre de mystifications.
Pendant toute l’année, ils invoquent la visite du Père Noël pour rappeler à nos enfants que sa générosité se mesurera à leur sagesse; et le caractère périodique de la distribution des cadeaux sert utilement à discipliner les revendications enfantines, à réduire à une courte période le moment où ils ont vraiment droit à exiger des cadeaux.
Historiquement, pour le Père Noël de l’Europe occidentale, la prédilection pour les cheminées et pour les chaussures, résulte purement et simplement d’un déplacement récent de la fête de Saint Nicolas, assimilée à la célébration de Noël, trois semaines plus tard.
Au moyen âge, les enfants n’attendaient pas dans une patiente expectative la descente de leurs jouets par la cheminée. Généralement déguisés et formés en bandes, ils allaient de maison en maison, chanter et présenter leurs vœux, recevant en échange des fruits et des gâteaux. Fait significatif, ils évoquaient la mort pour faire valoir leur créance.
« Douce nuit, sainte nuit »
« Stille Nacht, heilige Nacht » en allemand. Ecrit en 1816 par le prêtre Joseph Mohr, il a été chanté pour la première fois dans la nuit de Noël 1818 dans l'église Saint-Nicolas de la ville autrichienne d'Oberndorf bei Salzburg. La même année exactement que notre « Il est né le divin Enfant » ! Car les Européens du XIXe siècle, témoins de grands bouleversements, des révolutions politiques à la révolution industrielle, ressentirent le besoin de ranimer des traditions de Noël dont ils craignaient qu’elles ne disparaissent dans la tourmente des temps modernes.
En témoigne le magnifique conte de Noël de Charles Dickens, A Christmas Carol, paru en 1843. Noël est « le seul moment » dans « le calendrier de l’année, où hommes et femmes semblent d’un commun accord ouvrir librement leurs cœurs longtemps fermés et traiter les gens qui leur sont inférieurs non en créatures d’une race différente marchant vers une autre destinée, mais comme leurs vrais compagnons de voyage sur le chemin du tombeau », écrit Dickens.
Le 24 décembre 1914, le long du front belge près d'Ypres, quelques soldats allemands allument des bougies et entonnent Stille Nacht ; le chant est repris par des combattants anglais et une « Trêve de Noël » s'instaure, pour une journée. Depuis mars 2011, Douce nuit, sainte nuit appartient au patrimoine culturel immatériel de l'humanité reconnu par l'UNESCO.
Friandises et cadeaux
Une autre tradition de Noël très vivante et durable au Moyen Âge, dont les rites furent codifiés par l’Église avant d’être condamnée au XVe par le concile de Bâle, voyait des jeunes gens aller de porte en porte à la campagne pour quêter des friandises. En ville, c’étaient des groupes de jeunes clercs déguisés et exubérants qui quémandaient de l’argent dans les rues, promettant la bénédiction de Dieu aux généreux, et aux autres… (selon le même principe que le « trick or treat » de Halloween !). On était encore loin du cadeau de Noël, mais on y arrive, car, contrairement à ce qu’on a pu dire, celui-ci n’a pas été inventé au XIXe par le capitalisme.
Ainsi, au XVe siècle, à Fribourg-en-Brisgau, on emplissait de fruits et de sucreries l’arbre trônant dans une salle de l’hôpital du Saint-Esprit. Ses branches étaient secouées, et les malades ramassaient ce qui tombait : un ancêtre de notre sapin de Noël ? Dans le même esprit, un manuscrit de l’hôpital de Strasbourg de 1412 indique que, pour Noël, il faut offrir un grand pain d’épice ou deux petits à chaque lépreux. Des friandises mais aussi des jouets : dans le célèbre Mystère d’Arnoul et Simon Gréban, joué pour la première fois en 1450, un berger offre à l’enfant Jésus, une « hochette très bien faite qui dira clic-clac à l’oreille » et un « beau calendrier de bois ».
Depuis le 17e siècle, un jour de fête est dédié au retrait des décorations comestibles qui ornent le sapin de Noël des familles scandinaves avant de jeter ce dernier. Le 13 janvier, on célèbre la Saint-Knut, en l’honneur du roi Knut, qui régna au 11e siècle. Cette fête est surtout importante en Suède. Elle marque le 20e et dernier jour de la période de Noël (dans les autres pays, cette période dure 12 jours).
Pour fêter la Saint-Knut, les familles accrochent des biscuits et autres friandises dans leur sapin à l'intention des enfants. Une fois que les décorations ont été consommées, tout le monde se met à chanter avant de mettre le sapin nu sur le trottoir. En Norvège, l’arbre est découpé et jeté dans la cheminée.
Maintenant que les Suédois retirent leurs décorations de Noël plus tôt, les traditions de la Saint-Knut sont quelque peu tombées dans l’oubli, bien que la tradition perdure dans les poèmes et chants traditionnels du pays.
Et la bûche ?
L'histoire de la bûche de Noël peut remonter jusqu'au Moyen-Âge. A l'époque, la bûche venait bien de l’arbre : ce gros rondin de bois était sacré. Pendant le solstice d'hiver, pour la nuit la plus longue de l'année, on faisait brûler une énorme bûche arrosée d'huile ou de vin. L'aîné et le cadet de la maison devaient déposer cette bûche dans le foyer de la cheminée.
Avant d’apparaître sur les tables bourgeoises, elle était brûlée dans les cheminées le 24 décembre selon des coutumes précises. Dans certaines régions de France on maintenait parfois ce feu jusqu'à l'Epiphanie. En brûlant, cette bûche avait pour rôle de purifier la maison, d'éloigner les mauvais esprits. Elle était symbole de vie et de renouveau pour les croyants. Les cendres de cette bûche étaient alors conservées jusqu'à l'année suivante ; on considérait qu'elles protégeaient et portaient chance à la maison.
Ce n'est que vers 1870 que cette bûche de bois s'est transformée en pâtisserie. L'origine exacte du gâteau n'est pas connue : plusieurs pâtissiers en revendiquent la paternité. Selon les sources, elle pourrait avoir été créée par un ouvrier pâtissier de l'Hôtel de Ville de Paris en 1834, par le pâtissier parisien Antoine Charadot, inventeur de la crème au beurre, dans sa boutique de la rue de Buci en 1879, par le chocolatier lyonnais Félix Bonnat dans les années 1860, ou même par le pâtissier glacier du prince Charles III de Monaco, Pierre Lacam, en 1898.
Il est aussi communément accepté que, simplement, tous ces pâtissiers ont eu, à la même époque, l'idée de créer un gâteau roulé, avec des motifs imitant une bûche en bois, pour les fêtes de fin d'année. Elle était aussi décorée avec des petits personnages en sucre ou en plastique.
Il existe en Catalogne une autre tradition. Bûche creuse arborant un visage sur une extrémité, le Tió de Nada prend place dans la maison des familles quelques semaines avant Noël. Les enfants doivent s’en occuper en l’enveloppant dans une couverture et en lui laissant de la nourriture et de l’eau chaque nuit. Le 25 décembre, ils donnent des coups de bâton au Tió de Nadal pour que celui-ci « libère » des cadeaux et des friandises, par un trou situé à l’arrière de la bûche.
Cette tradition pour le moins surprenante aurait pour origine un rituel païen lors duquel on mettait le feu aux bûches pour rester au chaud pendant l’hiver. Quant à la raison pour laquelle la bûche doit « libérer » ses trésors, cela pourrait avoir un lien avec le Caganer, le santon d’un paysan en train de déféquer. Ce « chieur », comme on peut le traduire littéralement, représente « le monde à l’envers, une situation qui honore les pauvres ou les personnes en marge de la société, tandis que les nobles sont rabaissés ».
Les vraies origines de ce rituel catalan restent toutefois mystérieuses. Comme pour de nombreuses autres coutumes relatives au sapin de Noël, elles se perdre à jamais.
Un Tió de Nadal, tradition de Noël en Catalogne, attend de trouver preneur sur un marché de Noël à Barcelone, en Espagne. - Cisco Pelay, Alamy Stock Photo
Le sapin de Noël
L’origine du sapin ?
Il y a 4.000 ans, on parlait déjà du traditionnel sapin (de Noël) : les Celtes associaient un arbre à chaque mois de l’année et le sapin était celui associé à l’équinoxe d’hiver, car symbole de vie et de renaissance du soleil. Chaque 24 décembre, on prit l’habitude de le décorer avec des fruits et des épis de blé.
Depuis l’Antiquité, les branches de conifères sont des décorations essentielles et traditionnelles pour les célébrations païennes du solstice d’hiver. Ces arbres majestueux représentent la victoire de la vie et de la lumière sur la mort et la pénombre.
Au IV° siècle, l’église chrétienne fixa la célébration de la naissance du Christ le même jour pour concurrencer cette fête païenne. Un peu plus tard au XI° siècle, les hommes le garnirent de pommes rouges pour symboliser le paradis.
Il est difficile de savoir exactement quand et où ces traditions païennes sont devenues celles que nous connaissons aujourd’hui. Plusieurs pays se revendiquent comme le lieu d'origine du sapin de Noël et il existe de nombreuses mythologies relatives à sa signification. Si les sapins de Noël prennent aujourd’hui place dans les maisons du monde entier, leurs origines remontent aux forêts denses de conifères, notamment celles d’Europe du Nord. Comment le sapin de Noël est-il devenu une icône des temps modernes, insufflant par la même occasion de nouvelles coutumes ?
La Lettonie et l’Estonie se revendiquent toutes deux comme le lieu de naissance du premier sapin de Noël. Cette tradition existerait en Lettonie depuis 1510, lorsque l’association de marchands La Maison des Têtes noires traversa la ville avec un sapin et le décora avant de le brûler quelque temps après. L’Estonie a répliqué à ces allégations, affirmant qu’une fête similaire organisée par cette même association avait eu lieu en 1441 à Tallinn, la capitale du pays.
Ces revendications ont cependant été remises en cause par des historiens qui estiment que ces festivités n’avaient très certainement aucun lien avec Noël. Cela n’empêche cependant pas les deux pays de continuer à s’affronter pour revendiquer leurs droits. Une plaque qui commémore le lieu où aurait été installé le premier sapin de Noël a même été posée sur la place de la mairie de Riga (Lettonie).
La coutume d’installer un sapin dans les maisons à Noël pourrait se rattacher à ces rites anciens car bien que la France catholique y vit d’abord une tradition protestante, elle l’adopta au XIXe siècle. L’arbre sera décoré, chargé de symboles qui évoquent les souhaits de prospérité pour l’année à venir.
À bien y réfléchir, la tradition des sapins de Noël est bien curieuse. En décembre, partout dans le monde, on choisit - et parfois même on coupe soi-même - un arbre avant de l'installer chez soi. On l'orne alors de guirlandes lumineuses, de boules et autres décorations, … avant de s’en débarrasser sans cérémonie au début du mois de janvier !
Un sapin de tradition allemande
Le sapin de Noël tel que nous le connaissons serait plutôt apparu au 16e siècle en Alsace (à l’époque, la région française faisait partie du territoire allemand). En 1521, pour la première fois et dans cette région, on attribua un nom à cet arbre : « le sapin de Noël ». Pour célébrer cette fête, on le garnissait de pommes, de confiseries, de petits gâteaux et des bougies en ayant soin de ne pas oublier l’étoile symbolisant Bethléem. Un sapin s’élevait devant la cathédrale de Strasbourg en 1539. La tradition a pris une telle ampleur dans la région que la ville de Freiburg dut interdire en 1554 l’abattage des sapins pour Noël.
La tradition a toutefois pris de l’ampleur chez les familles allemandes et a progressivement évolué vers sa forme actuelle. Le réformateur protestant Martin Luther est souvent considéré comme la première personne à avoir mis des lumières dans le sapin de Noël (des bougies, les guirlandes électriques modernes ayant été inventées en 1882). L’idée lui serait venue après une balade en forêt sous le ciel étoilé. La tradition s’est ensuite répandue à d’autres pays par le biais des émigrants allemands.
Au 18e siècle, les sapins de Noël avaient conquis toute l’Europe. On commença à les illuminer en remplissant d’huile des coquilles d’œufs dans lesquelles flottent des mèches allumées. La polonaise Marie Lecszinska, épouse de Louis XV, en fit installer un pour la première fois au château de Versailles, coutume déjà répandue en Alsace et en Lorraine. En 1837, la princesse allemande Hélène de Mecklembourg, belle-fille du roi Louis-Philippe, fit décorer un sapin aux Tuileries.
Après la guerre de 1870, l’installation du sapin pour le temps de Noël devint une tradition « importée » par les hommes venus de l’Est de la France.
Le folklore apporte de nombreuses explications différentes à la signification de l’arbre. Pour certains, il s’inspirait de l’arbre-paradis, symbole du jardin d’Eden qui apparaissait dans une pièce de théâtre médiéval sur Adam et Ève. D’autres pensent que le sapin de Noël tire son origine des pyramides de Noël, structures en bois décorées de branches de conifères et de personnages religieux. Ces théories seraient en réalité non fondées, le sapin de Noël devant être religieusement neutre dans le contexte du christianisme.
D'abord vu comme une tradition protestante, le sapin de Noël est adopté par les foyers catholiques français au XIXe siècle.
La mode du sapin lancée par la reine Victoria en Angleterre
La reine Charlotte, princesse d’un duché allemand qui épousa le roi d’Angleterre George III (1738 – 1820), aurait introduit le premier sapin au sein de la famille royale. Mais c’est une autre reine britannique qui fit du sapin de Noël le symbole des fêtes que nous connaissons aujourd’hui.
En 1848, la reine Victoria et son mari le prince Albert de Saxe (lui aussi d’origine allemande !) captèrent l’attention des observateurs royaux du monde entier. Le magazine Illustrated London News avait en effet publié une illustration de leur famille rassemblée autour d’un sapin de Noël décoré. À l’époque, la reine Victoria était une faiseuse de mode et la tradition gagna le monde entier.
Cette illustration datant de décembre 1848 représente la reine Victoria, le prince Albert et leurs enfants admirant un sapin de Noël. De nombreuses déclinaisons de cette image ont commencé à circuler - Hulton Archive, Getty Images
De nos jours, le sapin de Noël le plus célèbre de Londres est celui qui illumine Trafalgar Square chaque hiver. Et celui-ci peut se targuer d’avoir une riche histoire. En 1947, la Norvège décida d’offrir chaque année au Royaume-Uni un sapin de Noël en guise de remerciement pour son aide lors de la Seconde Guerre mondiale, puisque le gouvernement norvégien trouva refuge au Royaume-Uni après l’invasion du pays par les nazis. La tradition était née.
Ian Fleming, l'auteur des romans de James Bond, aurait participé à la première installation d'un arbre de Noël norvégien à Trafalgar Square en 1942. Il aurait suggéré l'idée à l'ambassadeur norvégien après une soirée avec son ami, l'amiral Norman Denning, qui travaillait avec lui dans les services de renseignement de la marine pendant la guerre. Un commando norvégien, Mons Urangsvag, aurait rapporté deux sapins d'un raid en Norvège. L'un des arbres était destiné au roi Haakon VII de Norvège, qui s'était enfui en Grande-Bretagne après l'invasion nazie. L'autre arbre, sur une suggestion de Fleming, devait être érigé sur Trafalgar Square comme symbole de gratitude. Ils auraient utilisé deux jeeps pour transporter l'arbre et des fusées éclairantes pour l'illuminer.
Cette histoire contredit la version officielle, qui affirme que le premier arbre a été offert par le roi Haakon lui-même et qu'il provenait de son palais d'été à Oslo. La tradition de l'arbre de Trafalgar Square s'est perpétuée depuis lors. Le conseil de Westminster en est responsable.
Des sapins illuminés aux Etats-Unis
La tradition allemande du sapin de Noël est certainement parvenue aux États-Unis à la fin du 18e siècle, lorsque les troupes de Hesse vinrent apporter leur soutien aux Britanniques pendant la guerre d’indépendance. Dans les années qui suivirent, les immigrés allemands arrivèrent dans le pays avec leur tradition. Au fil du temps, le sapin de Noël « devint un objet de fascination pour les autres Américains ».
C’est après 1850, lorsque le magazine de Philadelphie Godey’s Lady’s Book rapporta la scène du Noël de la famille royale tirée du Illustrated London News, que les familles américaines adoptèrent plus largement le sapin. Quelques modifications avaient cependant été apportées à l’illustration : la couronne de Victoria avait disparu, tout comme l’écharpe royale d’Albert, afin « d’américaniser » comme il se devait la famille.
Aujourd’hui, deux sapins de Noël très populaires sont illuminés aux États-Unis dans le cadre du rituel de lancement de la période des fêtes de fin d’année. En 1923, le président Calvin Coolidge supervisa à Washington D.C. l’illumination des décorations du premier sapin de Noël national (baptisé « National Community Christmas Tree » dès l'année suivante). 10 ans plus tard, en 1933, New York illumina le premier sapin au Rockefeller Center ; depuis, touristes et New-Yorkais sont nombreux à venir l’admirer à l’occasion des fêtes. À l’exception de quelques Noëls dans les années 1940 en raison des coupures d’électricité pendant la Seconde Guerre mondiale, les deux sapins ont toujours été régulièrement illuminés.
Le National Community Christmas Tree est illuminé dans la partie sud de l’Ellipse de la Maison blanche, à Washington. - Yasin Ozturk, Anadolu Agency/Getty Images
Le sapin de Noël illuminé du Rockefeller Center à New York. Plus de 50.000 lampes à LED brillent dans l’épicéa commun mesurant près de 23 mètres de haut. - Diane Bondareff, AP Images pour Tishman Speyer/Xinhua/Alamy Stock Photo
Le sapin du Nouvel An en Russie
La Russie a une longue tradition de sapins de Noël. Pourtant, ceux illuminés sur la place des cathédrales du Kremlin chaque année en décembre ne célèbrent pas Noël. Ce sont des arbres du Nouvel An, ou yolka en russe.
Ceci depuis l’interdiction des sapins de Noël après la révolution russe, quand, dans les années 1920, le gouvernement soviétique fraîchement arrivé au pouvoir se lança dans une campagne anticléricale. Les premières mesures prises portèrent sur les traditions considérées comme bourgeoises, à l’image de Noël. Les sapins et autres coutumes étant interdits, le régime laïc commença à encourager les citoyens à célébrer le Nouvel An à la place.
Arbre de Noël près du Musée historique et GUM sur la Place Rouge à Moscou par une nuit d'hiver
Noël fit son retour en Russie dans les années 1990 avec la chute de l’URSS, mais la tradition de l’arbre du Nouvel An perdure.
Un sapin en métal dans l’antarctique
L’Antarctique a aussi son lot de traditions en matière de sapin de Noël, malgré l’absence totale d’arbres au pôle Sud. En 1946, les membres d’équipage de l’U.S. Navy en expédition dans la région célébrèrent Noël en mer en attachant une épinette blanche au mât du navire. Puis, les chercheurs de la base américaine antarctique Amundsen-Scott créèrent un sapin de Noël en ferraille, décoré d’ornements faits sur mesure.
L'arbre d’aujourd’hui a vu le jour au début du XXI° siècle, construit à partir de déchets et de pièces métalliques mises au rebut. Depuis, chaque année, les membres de l'équipe ont ajouté leurs propres ornements et décorations (écrous, boulons, outils cassés, lames de scie, engrenages, toutes sortes de ferrailles, …) ce qui a donné lieu à une création sculpturale monstrueuse qui a plus de personnalité et de caractère que n'importe quel autre arbre de Noël.
Si cette tradition s’est brièvement perpétuée, avec l’ajout de nouvelles décorations chaque année par les ferronniers, la Fondation nationale pour la science a indiqué que le sapin en ferraille ne faisait plus partie des traditions des fêtes de Noël à la station de recherche antarctique.
Des bateaux de Noël en Grèce
Autrefois, les Grecs décoraient des bateaux de Noël plutôt que des sapins en l’honneur de Saint-Nicolas, saint patron du pays et protecteur des pêcheurs. Tandis que les familles plaçaient de petits bateaux en bois au sein de leur maison pour symboliser le retour de ceux partis en mer, les embarcations illuminées occupaient une place d’honneur sur les places publiques des villes comme Thessalonique.
Aujourd’hui, le sapin de Noël fait de l’ombre au bateau. Quelques embarcations sont néanmoins encore visibles dans certaines communautés insulaires.
La place Syntagma, à Athènes, en Grèce, accueille un navire décoré de guirlandes électriques au moment des fêtes de Noël.- Wassilis Aswestopoulos, NurPhoto/Getty Images
Des friandises comme décoration en Scandinavie
Depuis le 17e siècle, un jour de fête est dédié au retrait des décorations comestibles qui ornent le sapin de Noël des familles scandinaves avant de jeter ce dernier. Le 13 janvier, on célèbre la Saint-Knut, en l’honneur du roi Knut, qui régna au 11e siècle. Cette fête est surtout importante en Suède. Elle marque le 20e et dernier jour de la période de Noël (dans les autres pays, cette période dure 12 jours).
Pour fêter la Saint-Knut, les familles accrochent des biscuits et autres friandises dans leur sapin à l'intention des enfants. Une fois que les décorations ont été consommées, tout le monde se met à chanter avant de mettre le sapin nu sur le trottoir. En Norvège, l’arbre est découpé et jeté dans la cheminée.
Maintenant que les Suédois retirent leurs décorations de Noël plus tôt, les traditions de la Saint-Knut sont quelque peu tombées dans l’oubli, bien que la tradition perdure dans les poèmes et chants traditionnels du pays.
Il était une fois … les boules de Noël
Les sapins décorés sont connus dès le 16ème siècle en Europe, et particulièrement en Alsace-Lorraine, et c’est alors qu’apparaît le terme de « sapin de Noël » pour désigner cette tradition en plein essor. Pommes et confiseries ornent ce qui symbolise alors l’arbre de paradis, tandis que l’étoile perchée à l’extrémité du sapin représente l’étoile de Bethléem.
Pour autant, les décorations de sapin telles que nous les connaissons aujourd’hui, et plus particulièrement les boules de Noël en verre soufflé, n’apparaissent que beaucoup plus tard. On raconte en effet que c’est en 1858, alors que la sécheresse privait les Vosges du moindre fruit d’arrière saison, qu’un souffleur de verre de la manufacture de Goetzenbruck eut l’idée – pour réparer cette injustice de la nature - de leur substituer des formes en verre.
Tradition du verre soufflé dans les Vosges
La naissance d’une telle tradition au cœur des Vosges du Nord ne doit rien au hasard. En effet, cette région possède en abondance toutes les ressources indispensables au développement d’une activité verrière : le grès argileux, le sable (silice) et la potasse (cendres de bruyères et de fougères) qui entrent dans la composition du verre, et enfin le bois, combustible pour alimenter les fours.
Les premières traces d’activité verrière dans les Vosges remontent à 1531, mais ce n’est qu’au début du 18ème siècle, avec la création des deux grandes verreries de la région, Meisenthal en 1704, puis Goetzenbruck en 1721, que se constitue un véritable bassin de vie autour de l’économie du verre.
Une forme, des usages
Conjuguée à l’argenture du verre, la technique des boules (extrapolée de la fabrication des verres de montre qui ont la particularité d’être bombés –la spécialité de la région-) permet, dès 1866, la fabrication de boules argentées de formats très divers.
Ces boules trouvent rapidement quantités d’applications décoratives et fonctionnelles ; la déclinaison de leur usage en tant que décoration de Noël ne se généralisera quant à elle qu’après 1871, sous l’influence croissante des pratiques traditionnelles germaniques.
A la fin du 19e siècle, les boules argentées des Vosges jouissent d’une belle réputation. Dans certaines régions d’Europe de l’Est, le pouvoir réfléchissant de ces « boules panorama » est associé à des croyances populaires. Connues sous le nom de « boules de sorcières », celles-ci sont placées à l’entrée ou aux abords des maisons pour surveiller les alentours et éloigner les mauvais esprits.
Dans les années 1950, les boules en verre soufflé des Vosges, dont les formes deviennent variées (pommes, grappes de raisin, pommes de pin, …) sont diffusées dans le monde entier.
L’histoire du marché de Noël
Si les marchés de Noël sont aujourd'hui une tradition populaire, depuis 800 ans leur histoire est semée de soubresauts religieux, politiques et commerciaux. Comment le marché de Saint-Nicolas du XIIIe siècle est-il devenu celui du XXIe siècle ?
Une tradition venue d'Autriche
C'est le 6 décembre 1294 à Vienne, en Autriche, qu'aurait eu lieu le premier marché de Noël. Ce jour-là, l'Église fête saint Nicolas de Myre, évêque du IV° siècle, reconnu pour sa charité et sa foi combative. Une légende ancienne raconte qu'il aurait ressuscité trois enfants. C'est pour cela qu'il devint le patron des écoliers. En son honneur, une première fête est organisée, elle est alors appelée le "marché de la Saint-Nicolas". Très vite, le rendez-vous devient incontournable. La manifestation se développe, et chaque ville alentour jusqu'en Allemagne se met à organiser au XV° siècle son propre marché.
En 1434, Dresde organise, sous l'impulsion du prince Frédéric II de Saxe, son tout premier marché. Connu sous le nom de Dresdner Striezelmarkt, il est réputé aujourd'hui pour être le plus ancien marché de Noël d'Allemagne. Tout aussi célèbre, celui de Nuremberg ; si la plus ancienne trace écrite remonte à 1628, certains attestent qu'il existerait depuis 1530.
Du marché de Saint-Nicolas au marché de l'enfant Jésus
Au XVI° siècle, sous l'impulsion de la réforme du protestantisme, les marchés de la Saint-Nicolas sont annulés. Cette branche du christianisme entend lutter contre le culte des saints et souhaite replacer le Christ au cœur de la tradition. Pas question donc, de consacrer une telle fête à un saint !
Pour ne pas désavantager les forains, une solution est trouvée : ils seront remplacés par des Christkindlmarkt (marché de l'enfant Jésus) et auront lieu une semaine avant le 25 décembre. Les enfants reçoivent leurs cadeaux de l'enfant Jésus et non plus de saint Nicolas. C'est la naissance du marché de Noël moderne.
Durant cette période, les marchés de Noël se développent dans l'est de la France. Parmi eux, le plus célèbre reste celui de Strasbourg, né en 1570. Il a été pendant longtemps le seul marché de Noël de France.
Un outil de propagande nazie dans les années 1930
Dans les années 1930, le parti nazi s'approprie les coutumes de Noël. Crèches, calendrier de l'Avent... Hitler veut contrôler tous les aspects pour en faire une fête nationaliste et stimuler l'économie allemande. En ce qui concerne les marchés de Noël, il impose la vente uniquement de produits nationaux et il standardise les décorations des échoppes des marchés. En 1936, Berlin accueille 2 millions de visiteurs.
C'est la Seconde Guerre mondiale qui marque la fin, pour un temps, des marchés de Noël. En 1941, la plupart des villes n'en organisent plus. Ils ne reviendront que dans les années 1960-70, grâce au boom économique des Trente Glorieuses et la montée du consumérisme lié à Noël. Les marchés de Noël deviennent alors des événements culturels de masse.
Renouveau dans les années 1990
Alors que les marchés de Noël s'essoufflent dans les années 1980, n'attirant plus les touristes étrangers, l'Alsace décide de s'impliquer davantage pour les faire renaître et valoriser son identité culturelle. Strasbourg s'autoproclame « capitale de Noël » : elle organise le plus ancien marché de Noël depuis 1570 en France et emploie les grands moyens pour le faire savoir. Pari réussi : en 2022, le marché de Noël de Strasbourg connaît une fréquentation record avec environ 2,8 millions de visiteurs. L'Alsace entière s'empare de cette dynamique et la poursuit. Aujourd'hui, on en dénombre plus de 300 dans cette région.
Depuis les années 2000, chaque grande ville française organise son propre marché de Noël. Paris en abrite désormais plusieurs, notamment celui de l'avenue des Champs-Élysées qui a rejoint le Jardin des Tuileries en 2018. Il attire environ chaque année 15 millions de visiteurs.
Et le bonhomme de neige !
Cette tradition remonterait aux premiers colons européens qui arrivèrent dans les régions les plus froides de l’Amérique du Nord, Mais comment est née cette ma-nie de créer un bonhomme avec sa carotte en guise de nez ?
Avec les hivers particulièrement long près du pôle Nord, les colons ont commencé à réaliser des sculptures de neige, appelées alors "Bonhomme Hiver" pour s'occuper et s'amuser un peu. Au fur et à mesure, les familles en ont fait une tradition pour se rassembler en communauté et célébrer l'hiver. Au départ, le bonhomme était très simple, avec une seule boule de neige, des cailloux et des branches, puis il a évolué jusqu'à atteindre une taille humaine et s'est doté d'accessoires, de la carotte à l'écharpe.
Ainsi, le bonhomme de neige est devenu un symbole de l'hiver, de Noël et de la joie des enfants, dans l'hémisphère Nord. Cette œuvre d'art très éphémère a été pour la première fois notifiée par écrit au 16e siècle chez Shakespeare, ainsi que dans un recueil de comptines allemand en 1770. Loin d'être amical, le bonhomme de neige était alors représenté comme une grande figure menaçante, puisque les hivers étaient rudes.
Dès que la fête de Noël devient populaire, l'hiver le devient aussi, et le bonhomme de neige apparait plus convivial et amusant. D'ailleurs, le dessin-animé Disney "La Reine des Neiges" a choisi cette figure pour son personnage d'Olaf, particulièrement apprécié des plus petits.
Si en France, nos bonshommes sont faits de deux boules, en Allemagne, ce sont plutôt trois qui forment le corps de l'être de neige ! Les traditions quant à l'habil-lement du bonhomme changent en fonction des pays, avec un seau sur la tête au Japon plutôt qu'un chapeau, par exemple.
Avec les changements climatiques, il n’est pas étonnant de constater que la confection des bonhommes de neige est en voie de disparition en France et dans une partie de l’Europe.
Il faut dire qu’autour de ce rituel hivernal, auquel nous pourrions ajouter celui de la « bataille de boules de neige », se nouent à la fois des éléments d’ordre temporels et mémoriels : répétitivité annuelle, attente et impatience, symbole de l’hiver. Il existe aussi une forte codification : le bonhomme de neige est figé autour de règles précises qui signalent sa bonne réalisation, comme la carotte en lieu et place du nez.
Il offre un moment de joie, d’émerveillement et de célébration du mystère de la vie en plein cœur de l’hiver. La perte du bonhomme de neige en tant que rituel hivernal ne touche donc pas uniquement les enfants, et elle vient questionner la fragilisation des processus de transmission intergénérationnels.
La toute première photographie connue de bonhomme de neige, vers 1853. Llyfrgell Genedlaethol Cymru/The National Library of Wales
Malgré la disparition de la pratique du bonhomme de neige, ce dernier continue, paradoxalement, d’occuper une place fondamentale dans les productions des industries culturelles et créatives à destination des enfants, ainsi que dans la littérature jeunesse.
Les fêtes de Noël et de Hanouka
Elles ont de nombreux points communs et, en 2024, elles surviennent le même jour.
L’une a lieu le 25 décembre d’un calendrier solaire, l’autre le 25 Kislev d’un calendrier lunaire et il arrive, comme cette année 2024, que le jour de Noël coïncide avec le premier jour de Hanouka. Ce n’est pas le seul point commun entre ces deux fêtes. Elles sont des occasions de cadeaux, une ancienne tradition pour Noël, qui a récupéré le prestige d’un évêque du passé, Saint Nicolas de Myre, alias le père Noël, une habitude plus récente pour Hanouka où le cadeau était une simple toupie à quatre faces avec l’initiale d’un mot hébreu sur chacune: nes gadol haya, un grand miracle a eu lieu.
Si importants soient-ils, les cadeaux ne sont pas tout. Noël et Hanouka sont des fêtes de la lumière. Pour Noël, c’est la remontée du soleil victorieux, « sol invictus » des Romains, qui a déterminé la date de la fête. Pour Hanouka, c’est le miracle de la petite fiole d’huile pure retrouvée dans le Temple de Jérusalem profané, qui a permis au candélabre de luire pendant huit jours.
Les deux fêtes empruntent la même métaphore de la lumière: pour les Chrétiens, Jésus est la lumière du monde ; pour les Juifs, la lumière est la lutte pour faire émerger un monde meilleur.
Au cours de l’histoire, d’autres significations de ces fêtes se sont ajoutées. Ce ne sont pas les mêmes.
Noël est devenu le symbole de la paix. Jésus en est le Prince, suivant une expression reprise du prophète Isaïe et dans l’évangile de Luc, sa naissance est associée à une promesse de paix. N’a-t-on pas vu à la Noël 1914, dans des tranchées, d’improbables et brèves fraternisations entre combattants ennemis !
Hanouka est plus ambivalente: la fête repose sur un événement historiquement daté (164 avant l’ère chrétienne), la ré-inauguration du Temple (c’est le sens du mot Hanouka) repris par les troupes de Judas Macchabée. Mais l’aspect guerrier de l’événement a été oblitéré au profit du miracle de la fiole d’huile. Celui-ci n’est pas signalé dans les livres des Macchabées, qui sont considérés comme apocryphes par la tradition rabbinique et n’apparaissent pas dans les écrits de Qumran. La primauté donnée au pouvoir divin sur les exploits militaires humains reflète les conflits entre les pharisiens et plusieurs rois hasmonéens.
Mais ces exploits pour la défense et pour la survie nationale du peuple juif résonnent fortement dans l’histoire contemporaine d’Israel. De plus Hanouka, c’était le moment où chaque famille affirmait fièrement son identité juive en illuminant sa maison aux yeux d’un monde souvent hostile. Il n’est pas étonnant que cette fête soit devenue l’une des plus unitaires du judaisme.
C’est là où la préférence absolue pour la paix, quelles qu’en soient ses conséquences et ses modalités, peut être aussi une arme de destruction. C’est là où le message de Hanouka diverge de celui de Noel, lequel ne fut d’ailleurs jamais respecté par la chrétienté.
On lira avantageusement Noël. Toute une histoire, d’Olivier Grenouilleau (Cerf)
D’après : National geographic - Amy McKeever - 22 déc. 2020 / Le Pèlerin - 04 déc 2019, 23 déc 2022, 23 nov 2023, Christophe Chaland - 16 déc 2021 / Le Figaro –Astrid de Larminat – 19 déc 2024 / Herodote.net – déc 2024 / Causeur - Richard Prasquier - 27 déc 2024