La ténacité non récompensée
Jocelyn Bell Burnell, née en 1943 à Belfast, est une astrophysicienne, connue pour sa découverte du premier pulsar, pour laquelle son directeur de thèse Antony Hewish obtient le prix Nobel, ce qui déclenche une très vive controverse.

Jocelyn Bell Burnell lors du lancement de l’International Year of Astronomy (IYA) 2009, Paris-Grygar, photographiée par l’Institut d’astronomie, Académie des sciences de la République tchèque. DR
En 2018, l’astrophysicienne britannique Jocelyn Bell (née en 1943) a reçu le prestigieux prix « Breakthrough Prize in Fundamental Physics » aux États-Unis, et la Grande médaille de l’Académie des Sciences en France. Ces prix arrivent tard dans la carrière de cette grande scientifique puisqu’ils viennent récompenser une découverte faite en 1967 : celle des premiers pulsars radio, objets astronomiques émettant un signal périodique entre une milliseconde et quelques dizaines de secondes.
Jocelyn Bell se passionne dès l’enfance pour l’astronomie, et obtient un diplôme en sciences à l’université de Glasgow avant de s’intéresser à la radioastronomie à Cambridge. Préparant une thèse sous la direction de l’astronome britannique Anthony Hewish, elle contribue à la mise au point d’un radiotélescope visant l’étude des quasars, entités les plus lumineuses de l’univers.
Alors qu’elle examine les enregistrements captés par cet instrument, elle remarque une source radio périodique étonnante qui ne correspond pas au schéma habituel des quasars. Elle signale sa découverte à Anthony Hewish qui envisage un temps que ces signaux réguliers (environ 30 bips par seconde) soient la manifestation d’une civilisation extraterrestre. Peu convaincue par cette hypothèse, Jocelyn Bell pense que cet objet est une étoile agissant un peu comme un phare. Contre la volonté d’Anthony Hewish, elle poursuit sa recherche et découvre les pulsars. Les « bips-bips » correspondent au rayonnement électromagnétique très important émis par ces étoiles à neutrons qui tournent à toute vitesse sur elles-mêmes.
Mais Jocelyn Bell n’a pas encore obtenu de diplôme et son directeur de thèse a refusé qu’elle inclut sa découverte du tout premier pulsar dans sa thèse. Et lorsque les résultats de ses travaux sont publiés dans la revue Nature en 1968, la première signature à y figurer est celle ... d’Anthony Hewish. Elle jouira toutefois d’une réputation glorieuse dans la communauté scientifique qui la reconnaît comme la véritable découvreuse des pulsars. Cependant, c’est son ancien maître de stage qui reçoit le prix Nobel de physique en 1974 pour cette découverte pourtant réalisée par l’étudiante.
Plus tard, la scientifique s’amusera de cette injustice : « On peut actuellement s’en tirer extrêmement bien sans avoir obtenu de prix Nobel, et j’ai eu de nombreux autres prix, et tellement de récompenses et d’honneur que, en réalité, je pense que je me suis bien plus amusée que si j’avais eu le prix Nobel. C’est un feu de paille en quelque sorte : vous l’avez, vous êtes heureux le temps d’une semaine, et tout est terminé, plus personne ne vous remet quoi que ce soit après, parce qu’il y a le sentiment que rien ne peut être au même niveau. »
L'astéroïde (25275) Jocelynbell est également nommé en son honneur. L'observatoire Jocelyn Bell de Toulouse (OJBT), de l'association d'astronomie étudiante UPS in Space de l'université Toulouse-III-Paul-Sabatier, a été nommé en son honneur.
